Je feuillette un livre. Je feuillette un grand livre. Je feuillette un beau livre. Un livre-trace, un livre-mémoire. Un livre à histoires. Un livre à photos. De belles photos vraiment. Un visage y revient souvent. Au cours du temps, il change. Des paysages aussi. Beaucoup de grands espaces. Une vie, une bio, un écrivain américain amoureux de cette terre comme de ses premiers occupants. Alors, je glisse sur le fil de ses aspirations.
Jamais plus l’alouette des prés ne parviendra à élever son sifflement jusqu’à nos âmes. Dans la plaine, les champs sont attristés par nos cultures sans retenue. Il ne nous restera que le goût de ses plumes sur le vent.
Jamais plus l’ours ne frôlera les sapins sans redouter l’ignominie de l’humain qui nourrit la peur de sa liberté. Chaque arbre est un piège qui abrite un motif de fin à balles réelles. Il ne subsistera que les râles de son appel depuis les anciennes futaies.
Jamais plus le loup ne quittera la protection de la meute, où l’alpha et l’oméga écrivaient une odyssée pour vagabondage en solitaire. Dans un reflet de lune, l’évolution du néant tait les hurlements du sauvage. Nous ne nous rappellerons que de son amour pour sa louve.
Jamais plus le saumon ne remontera le torrent dans un éclair de lumière au milieu de l’écume pour rejoindre la mort, après avoir enfanté sa transmission du vivant. Les barrages sont des entraves au cycle de la perpétuité, des mains invisibles qui empêchent. Nous n’évoquerons plus que le plaisir de ses nages à contre-courant et de ses fraies sauvages.
Je feuillette un livre. Qu’importe qu’il nous aventure avec Jim Harrison, Jack London ou Henry David Thoreau. Eux ont traité de leur présent que nous ne connaîtrons plus qu’au passé. Même Jim. Même pour le vieux Jim des légendes d’automne.