C’est pas drôle d’être un papa
surtout le jour où
il faut piquer le chat.
J’y vais ? J’y vais pas ?
Je reste ? Je fais quoi ?
La souffrance, c’est pour toi
l’absence, c’est pour moi.
Et la douleur aussi.
Celle du manque.
Une simple piqûre
c’est le début d’une fin.
On l’aurait souhaitée
pelucheuse et soyeuse
elle n’a été que fugitive.
Trop rapide pour n’être plus.
Le temps a vécu.
Celui des caresses,
des mots doux ronronnés,
des nuits allongés
l’un contre l’autre
toi
minaudant
cajolant
ta tête enfoncée dans mon cou
pour lancer ta machine à rêves félins.
Et moi
béat
glissant une main sur ton ventre
pour écrire une sorte de « je t’aime »
mélancolique
une longue histoire d’amour
sans accrocs.
Pas le moindre coup de canine
de ton côté.
Quelques rares râles
les fois où je n’avais pas été assez attentif
à ton toi.
Et moi, quelques coups de gueule
pour des broutilles vite oubliées.
Combien y en eut-il ?
Si peu qu’il ne reste que l’envie
de te prendre à nouveau
au creux de mes bras.
Pas pour t’emmener là-bas
d’où l’on ne revient pas.
Non ! Pour te prendre et te bercer
comme on le fait à un enfant
pas encore assez grand.
Te prendre et te garder
pour lire encore
au fond de tes yeux bleus
cette belle histoire
déjà écrite la première fois.
Prends-moi, disais-tu
amène-moi chez toi
et aimez-moi.
C’est pas drôle d’être un papa
surtout le jour où
il a fallu piquer le chat.
La petite fille à qui nous t’avions
offert pour ses trois printemps
c’est la mienne.
Le bonheur qui agitait ses yeux brillants,
c’était le nôtre.
Et si ses yeux brillent encore
c’est parce qu’ils nichent en leurs coins
les larmes de l’adieu.
Le papa, c’est moi.
Le chat, c’était…